08 Avr 2025

Promouvoir la durabilité et créer des opportunités économiques : le rôle crucial des femmes entrepreneures vertes

Malgré ces statistiques, les femmes de la région jouent un rôle crucial dans des secteurs tels que la production alimentaire et l’agriculture, deux secteurs qui constituent des sources de revenus essentielles pour de nombreuses femmes et sont essentiels à la sécurité alimentaire et à la souveraineté de leurs communautés.
Pourtant, l’emploi dans l’agriculture et la production alimentaire dans le sud de la Méditerranée est souvent caractérisé par des conditions informelles précaires, notamment de bas salaires, une insécurité de l’emploi et un manque de protection sociale. Face à ces défis, un nombre croissant de femmes se tournent vers l’entrepreneuriat pour échapper à ces conditions et briser le « plafond de verre » qui les empêche souvent d’accéder à des postes de direction dans les entreprises et les organisations.
Ces dernières années, les femmes ont été reconnues comme l’un des groupes entrepreneuriaux à la croissance la plus rapide au monde, bien que les données précises restent limitées. Selon le rapport GEM 2023/24 sur l’entrepreneuriat féminin, les femmes représentent « plus d’un tiers des entrepreneurs à forte croissance dans les pays à faible revenu ». L’entrepreneuriat offre aux femmes la possibilité de mettre à profit leur expertise dans des secteurs spécifiques tout en acquérant un pouvoir de décision et en s’appropriant leur travail et leurs compétences.

« Avant de rejoindre Up-Fuse, j'avais du mal à joindre les deux bouts et à subvenir aux besoins de mes enfants », raconte Rania, mère célibataire soudanaise travaillant pour l'entreprise égyptienne Switcher UP-Fuse, fondée par Yara Yassin. « Mais ici, j'ai acquis de nouvelles compétences, trouvé un sentiment d'appartenance à une communauté et, surtout, je peux enfin subvenir aux besoins de ma famille. »

Les rapports et témoignages de femmes entrepreneures soulignent leur rôle crucial dans le développement et le bien-être de la société. Nombre d’entre elles intègrent des objectifs de profit à des objectifs environnementaux et sociaux, témoignant ainsi de leur engagement en faveur d’une croissance économique durable et inclusive. Les femmes entrepreneures contribuent significativement à la création d’emplois, à la création de richesses, à la réduction de la pauvreté, au développement humain, à l’éducation et à la santé, jouant ainsi un rôle essentiel dans le développement national.

De plus, elles s’engagent de plus en plus dans des entreprises vertes et durables, se positionnant ainsi à l’avant-garde de la transition écologique et de l’évolution vers une économie circulaire. Ce faisant, elles contribuent non seulement à la durabilité environnementale, mais aussi à l’autonomisation économique des femmes, favorisant ainsi une plus grande résilience et une plus grande innovation au sein de leurs communautés.

WingWoman Lebanon (WWL) est un exemple d’entreprise verte prospère, dirigée par des femmes, dans le sud de la Méditerranée. Fondée en 2020 par Meelie Pemberton, WWL est une ONG libanaise qui produit des serviettes hygiéniques et des couches réutilisables, offrant une alternative durable aux produits d’hygiène jetables. Chaque paquet de couches réutilisables remplace environ 6 000 couches jetables, réduisant ainsi considérablement les déchets mis en décharge et contribuant à la durabilité environnementale. Au-delà de son impact environnemental, WWL joue un rôle socio-économique transformateur, en particulier pour les femmes vulnérables au Liban, notamment les réfugiées syriennes et palestiniennes. 

 

Ces femmes fabriquent non seulement à la main les couches et les serviettes réutilisables, mais gèrent également les opérations quotidiennes de l’ONG, favorisant ainsi leur indépendance financière et sociale. Ces dernières années, WWL a créé plus de 27 emplois, offrant une source de revenus stable et une autonomisation économique aux femmes dans le besoin. Outre ses contributions environnementales et économiques, WWL s’engage également à briser les tabous autour des menstruations et à sensibiliser les communautés locales aux problèmes de santé des femmes. 

 

Cette mission tridimensionnelle, alliant durabilité, autonomisation économique et éducation, n’a pas été sans défis. Cependant, grâce à la persévérance, à la passion et au professionnalisme de Meelie et de son équipe, WWL a continué de croître et de prospérer au cours des cinq dernières années, démontrant ainsi le pouvoir de l’entrepreneuriat social dirigé par des femmes pour impulser des changements significatifs.

Dans le cadre d’une initiative similaire visant à relever les défis environnementaux et à réduire les vulnérabilités socio-économiques, Leila Horchani, originaire d’un petit village près de Sidi Bouzid, en Tunisie, a créé une ferme biologique où elle cultive des pommes de terre et des olives, tout en élevant des moutons, des bovins et de la volaille. Son objectif est de produire et de fournir des produits agricoles biologiques de haute qualité, offrant une alternative durable aux pratiques agricoles conventionnelles.

 

Avec son projet, Leila s’oppose à l’utilisation généralisée de pesticides non dégradables et hautement toxiques dans l’agriculture tunisienne et plaide pour une transition vers une agriculture respectueuse de l’environnement. Parallèlement, elle s’attaque aux dures réalités des femmes rurales en Tunisie, qui représentent 35 % de la population féminine du pays et 58 % de la main-d’œuvre rurale. Nombre d’entre elles subissent des conditions de travail précaires, notamment de bas salaires, de longues heures de travail et des contrats abusifs, souvent sans protection de la santé ni droits du travail.

 

Témoin direct de ces injustices, Leila, avec l’aide de ses amies rurales, a finalement créé une coopérative qui vend toutes sortes de produits biologiques tels que des haricots, des céréales, des herbes, des épices et des légumes. Sa mission va au-delà de l’offre de salaires équitables et de la sécurité de l’emploi : elle vise également à autonomiser les femmes en partageant ses connaissances et son expertise acquises en tant qu’entrepreneuse verte, afin de leur permettre de développer des moyens de subsistance plus durables et de participer à l’économie verte.

Dans un contexte tout aussi difficile, Aisha Dweikat a lancé son entreprise verte avec l’ambition de créer des emplois tout en promouvant le recyclage et la valorisation. Inspirée par le patrimoine créatif palestinien et l’ingéniosité des habitants du camp de réfugiés de Jénine, où l’on réutilise souvent des matériaux usagés, Aisha a cherché à transformer cette nécessité en un modèle économique durable. Le camp de Jénine, une zone densément peuplée de la ville de Jénine, en Cisjordanie, est marqué par un chômage et une pauvreté élevés, en particulier chez les jeunes et les femmes.
Consciente de ce problème, Aisha a fondé Aisha Design en 2018, une marque qui conçoit et fabrique des accessoires artisanaux inspirés du patrimoine palestinien, à partir de matériaux de récupération tels que le bois, l’éponge et le tissu. Par son initiative, elle souhaite sensibiliser à la surconsommation et à son impact environnemental néfaste, tout en favorisant l’autonomisation économique. Aisha envisage Aisha Design comme plus qu’une simple entreprise ; elle la voit comme un projet communautaire offrant des emplois et des revenus stables aux femmes réfugiées et à faibles revenus du camp.

Bien que ces initiatives menées par des femmes soient confrontées à des défis considérables en raison des contextes difficiles dans lesquels elles évoluent, leur impact est profond et considérable. Elles démontrent comment les femmes entrepreneures impulsent des changements positifs dans leurs communautés : elles favorisent la durabilité, préservent le patrimoine culturel et créent des opportunités économiques pour les populations vulnérables, en particulier les femmes.